Les Jacobins de Toulouse
Publié le 12 Février 2012
Si certains ne le savent pas encore, je suis actuellement étudiante en 3ème année de Licence en histoire de l’art à Toulouse. J’ai une préférence toute particulière pour l’époque médiévale, surtout pour l’architecture religieuse (pour encore plus de précision, le style gothique est mon préféré). Mais je m’intéresse également à l’ivoirerie, à la peinture, à l’orfèvrerie ainsi qu’à d’autres types d’architectures (castrale notamment). J’ai également une attirance pour l’architecture et les arts de la période allant du début du XVIème à la fin du XVIIIème siècle. L’histoire de toutes ces époques est aussi une passion.
Je prends beaucoup de plaisir à découvrir et à faire découvrir des œuvres de ces périodes. C’est pourquoi j’ai voulu commencer une
petite « chronique » sur des monuments, peintures, sculptures…que j’apprécie tout particulièrement. Je tacherai de ne pas trop employer de termes trop techniques pour ne pas vous perdre ^^.
J’espère que cela vous plaira et vous donnera envie de voir ces œuvres que j’affectionne.
Je ne sais pas à quelle fréquence je publierai des articles sur ce sujet, mais je vais commencer aujourd’hui par l’ensemble
conventuel des Jacobins de Toulouse.
J’ai été amenée à travailler sur ce monument plusieurs fois depuis ma L1, et il s’agit de l’édifice cultuel toulousain que je préfère
Sa présentation est donc fondée sur mes propres recherches, que j’ai effectuées pour constituer des dossiers.
Pour commencer, une petite histoire du couvent :
L’ensemble conventuel a été commandé par l’ordre des frères prêcheur, premier ordre mendiant (« mendiant » car, en théorie, les
frères devaient mendier leur pain quotidien auprès des fidèles, et se déplacer pieds nus) fondé en 1215 à Toulouse, par saint Dominique (qui est aussi à l’origine du tribunal de l’Inquisition à
Toulouse…). Le but premier de cet ordre était de ramener sur le chemin de la foi les hérétiques cathares, nombreux dans le sud-ouest du pays.
L’ensemble a été nommé ainsi en référence à un couvent parisien dépendant d’un autre couvent du nom de Saint-Jacques ; ses
frères étaient surnommés les Jacobins et cette appellation fut appliquer plus tard à tous les frères dominicains.
(Plan / Wikipedia)
L’ensemble conventuel comprenait l’église et sa sacristie, une salle capitulaire, une chapelle dédiée à saint Antonin, un réfectoire,
un grand cloître, un petit cloître, une chapelle dédiée à saint Jacques, un grand dortoir, une bibliothèque. Aujourd’hui il ne reste plus que l’église (et sa sacristie), la salle capitulaire, la
chapelle Saint-Antonin, le réfectoire (utilisé pour des expositions par la mairie de Toulouse) ainsi que le cloître. Le petit cloître, la chapelle Saint-Jacques ainsi que l’extrémité du grand
dortoir ont été détruit en 1772. Il est bien entendu possible de visiter tout cela.
(Cloître) |
(Salle capitulaire - des concerts y ont parfois lieu ) |
J’ai dit précédemment que l’ordre est en théorie « mendiant » car celui-ci est en fait victime de son propre succès : les prêches des
frères sont très appréciés, du coup les fidèles viennent de plus en plus nombreux dans l’église les écouter et donne de plus en plus d’aumône ; il faut donc construire plus grand et plus beau
pour accueillir la foule et la « retenir » dans l’église. Cela créé un cercle, une émulation.
Les travaux de l’église conventuelle (4 campagnes de construction en tout) ont débuté en 1230 pour se terminer un siècle plus tard,
en 1336. En 1385, elle a été consacrée à saint Thomas d’Aquin, dont elle a reçu les reliques.
Elle est bâtie en brique, comme beaucoup d’édifices du Midi, car les carrières de pierre sont rares.
(Vue vers le choeur / vers l'est) |
(Vue vers l'ouest) |
L’église actuelle est constituée de deux vaisseaux (espace longitudinal d’une église) et ne possède pas de transept (espace transversal qui coupe parfois l’axe longitudinal de l’église, et forme ainsi une croix latine). Les deux vaisseaux étaient à l’origine séparaient pas une clôture : les frères occupaient le vaisseau nord (qui donne directement sur les autres bâtiments conventuels) et les fidèles le vaisseau sud. Pour ce qui est du voûtement, l’église est voûtée d’ogives (arc saillant diagonal, qui relie deux points d’appuis). Au niveau du chevet (partie qui est construire après les vaisseaux ou le transept lorsqu’il y en un), il y a le bien connu « palmier » : un pilier qui reçoit les retombées de nombreuses ogives et d’autres éléments.
(Le Palmier)
L’édifice était totalement peint.
En 1789, lors de la Révolution française, le couvent est fermé ; deux ans plus tard, les reliques de saint Thomas d’Aquin sont
translatées à l’église Saint-Sernin de Toulouse. En 1812, Napoléon Ier fit des Jacobins une caserne militaire. Ceci impliqua de nombreux travaux au sein même du couvent (par exemple, la
chapelle Saint-Antonin fut transformée en infirmerie vétérinaire pour les chevaux, ce qui a fortement endommagé les peintures…). En 1865, les militaires finissent par déserter les lieux. En 1872,
un Lycée de garçon s’installa dans un bâtiment construit par les frères un siècle auparavant ; le cloître est utilisé comme cour de récréation (le Lycée existe toujours, couplé à un collège et a
des prépas : il s’agit de Fermat). Des travaux débutèrent au début du XXème siècle afin de remettre en état les toitures de l’église. Puis différentes campagnes se succédèrent, et petit à petit
l’ensemble recouvra de sa fierté. En 1974, le couvent retrouva ses reliques.
Je me suis attachée dans ce premier article à l’histoire du couvent et à l’architecture de l’église. J’espère ne pas trop vous avoir
ennuyé…mais j’ai tenté de dire le principal et de faire au plus court, tout en essayant de vous faire passer certains détails de l’histoire du lieu. J’ai sans doute perdu certains d’entre vous en
chemin ^^
Un autre article sera consacré plus spécifiquement à la chapelle Saint-Antonin, qui se trouve donc dans le couvent, que j’ai étudié plus en profondeur ; les peintures sont magnifiques :
(Entrée de la chapelle Saint-Antonin) |
(Intérieur de la chapelle) |
Si des questions subsistent sur l’ensemble conventuel ou sur des points historiques (saint Dominique, l’hérésie cathare,…), n’hésitez pas ; ce sera un plaisir de vous répondre.
Deux dernières photos :
(Façade occidentale de l'église) |
(Clocher) |
Si vous voulez poursuivre votre connaissance des Jacobins de Toulouse, voici LE livre de référence actuel : Maurice Prin, Les
Jacobins de Toulouse (l'auteur a suivi et a participé pendant près de soixante ans à la restauration des Jacobins).